Depuis plusieurs siècles, deux discours s'opposent sur l'Inde, aussi bien en Occident qu'en Inde même. L'un présente l'Inde comme "civilisation", c'est-à-dire comme une entité culturellement auto-suffisante, caractérisée par des règles et des idéaux spécifiques. L'autre discours, moins construit, et devenu minoritaire dans les réflexions intellectuelles, est celui d'une Inde " carrefour ", c'est-à-dire d'un espace de rencontre de différents courants, parmi lesquels on trouverait un certain nombre d'éléments cruciaux, originaires d'ailleurs. L'opposition entre ces deux discours a subi une rigidification à l'époque coloniale, quand la notion de l'Inde comme civilisation a triomphé, faisant déjà partie des dogmes de l'Indologie institutionnelle vers 1900. Aujourd'hui en Inde même, des groupes politiques à la recherche de l'essence de cette civilisation ont inventé l'idée d'une " hindouité " immuable pour faciliter leur tâche. Cela va de pair avec la montée en Occident des tendances qui continuent à chercher des " religions sans Dieu " dans le monde non-Occidental. Est-il encore possible de construire une autre vision du passé et du présent indien, dans laquelle on restituerait à l'Inde sa place dans une histoire universelle ? La conférence abordera ce problème, à partir d'une archéologie des débuts de l'Indologie aux XVIIe et XVIIIe siècles.